
Nous sommes au mois de juin. Je profite d’une dizaine de jours pour m’éloigner de la campagne francilienne et de ses étendues cultivées. À plusieurs centaines de kilomètres de la capitale, je découvre une vieille forêt qui semble à l’abri de l’activité humaine. J’ai lu quelque part qu’elle serait l’une des plus anciennes sapinières d’Europe. J’ai voulu vérifier. Au fil de mes recherches, les documents des naturalistes et les légendes de la région se sont croisées. Lors de mes balades, j’ai facilement compris les mythes que la forêt avait inspirés. J’ai photographié les clairières de mousse, les troncs crevassés, les bois morts recouverts de lichen argenté et les pieds de myrtilles qui s’étalent par centaines au bord des chemins. J’ai tendu l’oreille pour écouter les oiseaux chanter. Les forêts de résineux sont le territoire de prédilection de la plus petite des mésanges, la mésange noire. En avançant doucement, on peut avoir la chance de l’apercevoir. C’est d’abord son chant que j’entends, clair et rapide. Près de moi, Justin se fige pendant que je sors doucement le micro. Nous restons immobiles de longues minutes en scrutant les sapins. Dans l’ombre des épines, j’aperçois une minuscule boule de plumes sautillant de branches en branches. Elle est si légère qu’elle ne fait jamais bouger le perchoir sur lequel elle se pose. Dix grammes. Elle ne pèse que dix grammes. Cela équivaut à une cuillère à soupe de farine. Lorsque la mésange noire s’immobilise pour chanter, c’est le moment de l’observer. Sa tête est noire avec des joues et une tâche blanche sur la nuque. Mais déjà, elle s’envole en papillonnant un peu plus loin. — Photographies et audio : Massif central, juin 2023 — Sur les photos : Justin ; photographie de la mésange noire par Justin.












