J’ai écrit ce texte en écoutant Melomaneo & Griot – Du Matin

Au Pays basque, des chevaux aux poils épais arpentent les montagnes. Pas de barrière ni de clôture, ils sont chez eux partout et vivent au sein de petites hardes. Des poulains naissent ici, les plus vieux meurent sur la montagne. Les chevaux se nourrissent de l’herbe rase et se rassemblent aux sources. Parfois, j’en aperçois un qui galope et d’autres qui se grattent amicalement le garrot. Je m’émerveille de leur pelage jamais tondus et de leurs crins jamais brossés. Ils ont la crinière rebelle, le toupet en bataille et les yeux extrêmement calmes. Autour de leurs encolures, des cloches sont accrochées à l’aide de larges sangles de cuire. Où que j’aille, j’entends des tintements, le jour comme la nuit, et cela m’empêche de dormir lorsqu’ils sont trop proches… Et eux, s’habituent-ils vraiment à cet attirail qu’on leur impose ?

Le soir, lorsqu’un souffle glacial balaie les sommets, ils se tournent croupe au vent pour se protéger, et leurs longues queues volent sur leurs flans. Moi, je me suis réfugiée sous ma tente et je pense à eux dehors avec leurs poils qui les isolent du froid. Le lendemain, je les observe somnoler au soleil. Les yeux mi clos, ils semblent imperturbables comme leur montagne. Je passe tout doucement. Parfois, il arrive que l’un d’eux relève la tête et me fixe quelques secondes et je me demande comment il me perçoit.

Mais que font-ils ici, ces chevaux qui semblent libres comme l’air ? J’ai posé la question. Un homme m’explique qu’ils ont un propriétaire, son camarade hausse les sourcils en disant qu’on ne sait plus vraiment. À peine apprivoisés, aucun de ces petits chevaux ne s’approchera jamais de moi. Et j’espère n’avoir jamais fait un pas de trop vers eux. Ni nourris, ni chassés, il restent indifférents à ma présence. Je ne suis qu’un élément du paysage et cela m’apaise d’être à côté d’eux. De faire partie du paysage avec eux.

— Photographies : Pays basque français, janvier 2024.